MAURIAC (François). Né à Bordeaux. 1885-1970. Romancier. Prix Nobel de littérature en 1952.
L.A.S. « Fr. » à « Cher Jacques » [le père dominicain Jacques Laval]. S.l., 8 septembre 1941 (?). 1 p. 1/2 in-8.
Réf. G 5166
Superbe lettre au père dominicain Jacques Laval avec lequel Mauriac entretenait une relation épistolaire passionnante et intime
Mauriac confie ses inquiétudes : …Je vous remercie de ces pages qui me permettent de réentendre votre voix : ce sont des confidences plus « parlées » qu’écrites et dont je reconnais la vibration. Rien n’existe pour vous que vous-même et ceux qui sont mêlés à votre vie et vous ne connaissez que cela : mais c’est un monde...
Pour moi je continue d’être le serviteur inutile, dans ma jolie maison, devant cette douce (dame ?) campagne déjà touchée par l’automne...
Hélas avec quelle mauvaise conscience je goute ce repos et cette paix dans ce monde couvert de sang ! Vous savez que Gide aime a rappeler souvent le texte exact de l’Ecriture : « Celui qui ne prend pas sa croix et qui me suit est indigne de moi… ». Tel je suis, derrière le Christ mais sans ma croix… Si pourtant ! J’en ai une mais qui m’écrase moins.
Il fait beau. J’ai communié ce matin. Je ne souffre pas, et j’ai peur et j’ai honte de cela (…). Je rejette tout ce qui est livré par vous de ce que vous devriez tenir caché, mais c’est plus fort que vous. Priez pour nous, pour Claude, pour Jeanne, pour ma petite Claire. Doit-elle attendre un prisonnier qui l’adore… ? Mais elle n’a pour lui que de l’amitié [secret]. Et le temps passe… Comme on tremble devant ce destin de nos enfants !...
Jacques Laval commence sa carrière ecclésiastique en tant que prêtre au Diocèse de Reims (1937-1943) avant d’intégrer l’ordre des dominicains. Il occupe au début des années 1950 le poste de directeur du secteur culturelle de la télévision du Vatican. Il était en relation avec de nombreux écrivains et artistes, notamment François Mauriac. Il publia plusieurs romans sous le pseudonyme de Jean Lorbais. Mauriac se confia notamment à Laval au sujet de la tentation de la chair.
Il a vécu une grande partie de sa vie au Couvent des dominicains, rue de la Glacière à Paris où il est mort.